C’est à Fort-Liberté que l’acte de l’indépendance d’Haïti a été rédigé et signé, dit-on. De cet acte de l’indépendance constituant l’acte de naissance d’Haïti, Haïti est indépendante depuis le 29 novembre 1803. Ce qui ferait de Fort-Liberté la ville de l’indépendance. Par contre, cette histoire n’est pas connue de tous malgré que de nombreux historiens relatent ce fait, hormis Thomas Madiou. Certains s’apprêtent à croire que Gonaïves soit la ville de l’indépendance alors que cette dernière ne serait que la ville de proclamation ou de célébration de l’indépendance. Car, rappelons que c’est l’acte de naissance du pays qui traduit la date de naissance du pays, dans cet acte, il est stipulé qu’Haïti est indépendante depuis le 29 novembre 1803. De ce fait, la date du 1er janvier 1804 constitue la date de la proclamation et du festin de l’indépendance. À cet effet, Fort-Dauphin, actuellement la ville de Fort-Liberté serait-elle une autre oubliée de l’Histoire d’Haïti ?
La révolution Haïtienne va du 14 août 1791 au 29 novembre 1803, c’est-à-dire de la cérémonie du Bois-Caïman en passant par la bataille de Vertières le 18 novembre 1803 à la date officielle retenue pour la proclamation de l’indépendance d’Haïti. D’après des faits historiques, la victoire d’Haïti a été pendant des années commémorée dans la ville du Cap-Haïtien comme victoire définitive de l’armée indigène et de la libération d’Haïti. Par contre, la proclamation et la célébration de l’indépendance ont été consacrées aux Gonaïves le premier janvier 1804. La ville connaît une succession de changements de nom : Bayaja (1578), Fort-Dauphin (1732), Fort Saint-Joseph (1804), Fort-Royal (1811) et enfin Fort-Liberté (1820).
D’après les historiens anglais de l’époque, l’acte de l’indépendance d’Haïti est daté du Fort-Dauphin, actuellement Fort-Liberté, en date du 29 novembre 1803. L’histoire raconte que cet acte d’indépendance a été signé par Jean-Jacques Dessalines, Henry Christophe et Clervaux.
Voici l’acte de l’indépendance de Saint-Domingue, actuellement Haïti, tel que proclamé le 29 novembre 1803 :
Rendus à notre première dignité, nous avons recouvré nos droits et nous jurons de ne jamais nous les laisser ravir par aucune puissance de la terre. Le voile affreux du préjugé est maintenant déchiré ! malheur à ceux qui oseraient réunir ses lambeaux sanglants !
Propriétaires de Saint-Domingue, qui errez dans des contrées étrangères, en proclamant notre Indépendance, nous ne vous défendons pas de rentrer dans vos biens ; loin de nous cette pensée injuste ! Nous savons qu’il est parmi vous des hommes qui ont abjuré leurs anciennes erreurs, renoncé à leurs folles prétentions, et reconnu la justice de la cause pour laquelle nous versons notre sang depuis douze années.
Nous traiterons en frères ceux qui nous aiment : ils peuvent compter sur notre estime et notre amitié et revenir habiter parmi nous. Le Dieu qui nous protège, le Dieu des hommes, nous ordonne de leur tendre nos bras victorieux.
Mais, pour ceux qui, enivrés d’un fol orgueil, esclaves intéressés d’une prétention criminelle, sont assez aveugles pour se croire des êtres privilégiés et pour dire que le ciel les a destinés à être nos maîtres et nos tyrans, qu’ils n’approchent jamais du rivage de Saint-Domingue , ils n’y trouveraient que des chaînes ou la déportation.
Qu’ils demeurent où ils sont ! qu’ils souffrent les maux qu’ils ont si bien mérités ! que les gens de bien, de la crédulité desquels ils ont trop longtemps abusé, les accablent du poids de leur indignation.
Nous avons juré de punir quiconque oserait nous parler d’esclavage.
Nous serons inexorables peut-être même cruels envers tous les militaires qui viendraient nous apporter la mort et la servitude. Rien ne coûte, et tout est permis à des hommes à qui l’on veut ravir le premier de tous les biens.
Qu’ils fassent couler des flots de sang, qu’ils incendient pour défendre leur liberté les sept huitièmes du globe, ils sont innocents devant Dieu, qui n’a pas créé les hommes pour les voir gémir sous un joug honteux.
Si, dans les divers soulèvements qui ont eu lieu, des blancs dont nous n’avions pas à nous plaindre, ont péri victimes de la cruauté de quelques soldats ou cultivateurs trop aveuglés par le souvenir de leurs maux passés, pour distinguer les propriétaires humains de ceux qui ne l’étaient pas, nous déplorons sincèrement leur malheureux sort et déclarons à la face de l’univers que ces meurtres ont été commis malgré nous. Il était impossible, dans une crise semblable à celle où se trouvait la colonie, de prévenir ou d’arrêter ces désordres.
Ceux qui ont la moindre connaissance de l’histoire, savent qu’un peuple, fut-il le plus policé de la terre, se porte à tous les excès lorsqu’il est agité par les discordes civiles, et que les chefs ne sont pas puissamment secondés, ne peuvent punir tous les coupables, sans rencontrer sans cesse de nouveaux obstacles. Mais aujourd’hui que l’aurore de la paix nous présage un temps moins orageux, et que le calme de la victoire a succédé aux désordres d’une guerre affreuse, Saint-Domingue doit prendre un nouvel aspect et son gouvernement doit être désormais celui de la justice.
Donné au quartier-général du Fort-Dauphin, le 29 novembre 1803.
Signé :
Dessalines
Christophe
Clervaux
Secrétaire : B. Aimé