Le cocktail destructeur de l’Ingérence, du populisme, de la violence et de l’impunité

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Durant toute son histoire de vie de peuple, le peuple haïtien n’a jamais connu une situation aussi catastrophique. Depuis l’assassinat du Président Jovenel Moise en Juillet 2021, on dirait que les diables se sont entendus pour nous soumettre à ce déluge de feu destructeur. De ce fait, Haïti vit déjà l’expérience de cet enfer imaginaire.

N’était-ce la résilience de ce peuple, il aurait déjà disparu, car tout a été déjà mis en branle dans ce cadre. Durant ces derniers mois, la situation ne fait que s’empirer à travers de nouveaux faits et de nouveaux acteurs qui tendent à renforcer le chaos. Notre analyse nous montre que le pays fait face aujourd’hui à un cocktail destructeur qui s’articule autour de 4 grands points majeurs :

1- L’Ingérence étrangère

Certaines missions diplomatiques, notamment les États-Unis, la France le Canada et l’ONU, réunies au sein d’une structure dénommée Core Group s’autoproclamant « Pays amis d’Haïti » ont imposé aux haïtiens une diplomatie de chaos depuis plus de 20 ans. Les actions du Core Group vont plus loin que de simples ingérences traditionnelles dans les affaires internes d’un pays. Leurs actions sont inédites dans l’histoire des relations internationales.

Ils se donnent pour mission de changer les résultats des élections, designer des dirigeants, diriger le pays a travers des laquais. Ils ont catapulté Michel Martelly arrivant en 4ème position los des élections de 2011 en 2ème position pour finalement lui donner tous les moyens pour remporter les élections. Ils ont donné leur accord pour fédérer la gangs armés via un rapport de Madame Lalime devant le conseil de sécurité des nations unies. Ils ont fait fi de tout effort de consensus national pour remettre la gouvernance du pays au Docteur Ariel Henry à travers un simple Twitt.

De ce fait, depuis plus de 30 mois, malgré les performances médiocres de ce pouvoir, ils ne jurent que par le maintien de Ariel Henry au pouvoir. On doit toutefois rappeler que des organisations de défense de droits humains et même des diplomates de haut rang de l’administration américaine accusent l’actuel 1er Ministre de complicité dans l’assassinat du Président Moïse et de forts liens avec les bandits armées qui sèment la violence.

À tout cela, on doit ajouter que le chaos en Haïti constitue une manne d’opportunité pour des fonctionnaires internationaux et onusiens.

2- Le populisme

Le populisme constitue la pus grande menace pour l’établissement du progrès et de la démocratie en Haïti. Les élites locales s’allient facilement avec le populisme comme tremplin pour maintenir leurs emprises et mieux contrôler la société. En effet, depuis plus de 2 semaines, on assiste à une vague de populisme teintée de triomphalisme surfant sur la colère de la population contre le régime corrompu du Docteur Ariel Henry.

En effet, Guy Philippe, ancien commissaire de police qui a pris la tête de la rébellion armée contre le pouvoir de Jean Bertrand Aristide en 2004 est le nouveau révolutionnaire autoproclamé de ce mouvement. Après plus de 6 ans de prison aux États-Unis pour blanchiment d’argent provenant du trafic de la drogue, il se fixe pour objectif de conduire la révolution en vue de libérer le peuple haïtien, quelle blague ?

Dans un premier moment, il a promis de s’attaquer aux gangs, dans un deuxième moment il veut déloger Ariel Henry par la force, pour finalement promouvoir la désobéissance civile. Maintenant un de ses proches collaborateurs parle de la nécessité d’un rapprochement avec le pouvoir en place moyennant l’octroi d’un certain nombre de ministères régaliens.

À rappeler que le révolutionnaire autoproclamé a été élu sénateur sous la bannière d’un des regroupements satellites du régime Tèt Kale de Michel Martelly, un régime qui a conduit Haïti au chaos plus que tout autre régime dans l’histoire de ce pays qui a excellé dans la corruption, le narcotrafic et la violence des gangs.

3- La violence

Les complicités du pouvoir en place avec les bandits armés sont dénoncés à maintes reprises. Le gouvernement utilise la violence des gangs pour se perpétuer au pouvoir, mais surtout pour encourager une nouvelle occupation du pays par des forces étrangères qui devront uniquement légitimer leur pouvoir.

Tout est mis en branle pour décourager la police nationale et d’autres initiatives haïtiennes pour venir à bout de cette violence. Les opérations policières sont piégées par le haut commandement de la police. Le mouvement d’autodéfense populaire qui commençait à produire des résultats significatifs contre la violence des gangs a été combattu et boycotté par le gouvernement. Car, les forces étrangères depuis plus de 3 décennies ont plutôt renforcé le phénomène de l’insécurité au lieu de contribuer à une amélioration.

Les organisations de droits humains ne cessent de dénoncer la complicité et la passivité des autorités dans le chaos installé par les gangs armés. Dans une lettre du Réseau National de Défense des Droits Humains ( RNDDH) en date du 21 octobre 2021, le pasteur Jean Ferret Michel a étè kidnappé sous les ordres du ministre de l’Intérieur Liszt Quitel, qui avait fait office aussi de ministre de la justice et de la Sécurité Publique.

Toujours Selon le RNDDH, depuis le 15 janvier 2023, Vitelhomme INNOCENT, présenté par plus d’un comme le protégé du Chef de la Police, circule dans un cortège composé entre autres de deux (2) véhicules portant respectivement des plaques d’immatriculation Service de l’État et Officiel.

4- L’impunité

Sauf quelque cas insignifiants, Haïti le pays le plus corrompu de la région n’a jamais poursuivi un fonctionnaire pour corruption. Aussi, malgré des sanctions internationales contre des chefs de gangs, des politiciens corrompus et des membres de l’élite économique soutenant la violence des gangs et impliqués dans des actes de corruption massive, aucune disposition n’a été prise par ce gouvernement pour faire le relais avec la justice.

L’assassinat du Président Jovenel Moïse constitue la plus grande expression de l’impunité et des entraves judiciaires dans ce pays. Invité à comparaître par devant le juge d’instruction en charge du dossier d’assassinat du Président Moise depuis plus de 5 mois, c’est le juge d’instruction qui s’est finalement présenté au bureau du Premier Ministre pour être entendu par le juge selon ses convenances, fait inédit. On a l’impression que c’est le 1er Ministre qui a finalement auditionné le juge.

De ce fait, la lutte contre l’impunité constitue un enjeu important pour la bonne marche des institutions et la construction d’une économie de prospérité pour tous, malheureusement prise en otage par une clique oligarchique.

Pour terminer, nous disons que toute solution durable à la crise haïtienne doit nécessairement passer non seulement par le changement de régime du 1er Ministre Ariel Henry, mais surtout par la prise en compte de ces 4 facteurs dans la mise en branle d’une feuille de route.

ÉDITEUR / ÉDITRICE

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Jean Gary DENIS
Jean Gary DENIS est Sociologue et Historien. Aussi, il est directeur exécutif de l'Institut Haïtien d'Observatoire des Politiques Publiques (INHOPP).
https://www.lescientifique.org