Des haïtiens exigent le recours à la peine de mort contre les puissants bandits

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En Haïti, sous l’impuissance et la complicité des autorités haïtiennes (premier ministre, ministres, juges, parlementaires, politiciens traditionnels), les groupes de bandits armés sèment la pagaille et arrivent à bloquer la partie septentrionale et méridionale de la zone métropolitaine de Port-au-Prince depuis plusieurs années. Ces puissants groupes de bandits protégés par le régime politique actuel sont impliqués dans de nombreux cas d’assassinat, de kidnapping, de vols, de spoliation, de viols, de perturbation de l’ordre public. Cet article essaie d’analyser la perception des citoyens haïtiens (plus de 17 ans) sur leur compréhension de la situation insécuritaire du pays et le recours à la peine de mort. C’est quoi la peine de mort ? Comment la communauté internationale perçoit la peine de mort ? Quelles sont les méthodes d’exécution liées à la peine de mort couramment utilisées dans le monde ? Quel est le pourcentage d’haïtiens exigeant le recours à la peine de mort contre les puissants bandits matériels et intellectuels ? Pourquoi les États-Unis d’Amérique et le Japon n’abolissent pas la peine de mort alors qu’ils ordonnent aux pays d’abolir la peine de mort ?

C’est quoi la peine de mort ?

Alors que l’usage de la peine de mort évolue avec le temps et selon les États, la peine de mort est une peine prévue par la loi de certains États, consistant à mettre à mort une personne ayant été reconnue coupable d’une peine capitale (Ooreka, 2022).

De tout temps, la peine de mort a constitué la punition ultime d’un groupe contre un individu qui ne respecte pas les règle de vie de la communauté. La peine de mort est historiquement la sanction pénale la plus ancienne (la privation de liberté apparaît bien plus tardivement). Elle apparaît déjà dans le code mésopotamien de Hammurabi, comme une application de la loi du talion (œil pour œil, dent pour dent). Elle est ensuite appliquée par les Grecs (Aristote la juge nécessaire), les Romains, et dans les sociétés féodales du Moyen Âge.

Selon Amnesty international (S.d.),

  • À la fin de l’année 2021, 108 pays avaient aboli la peine de mort en droit ;
  • 579 exécutions ont été enregistrées par Amnesty International en 2021, un chiffre en augmentation de 20 % par rapport à 2020 ;
  • Des milliers de personnes auraient été exécutées en Chine, mais les statistiques relatives à la peine de mort restent un secret d’État.

Comment la communauté internationale perçoit la peine de mort ?

Amnesty International estime que la peine de mort constitue une violation des droits humains, en particulier du droit à la vie et du droit de ne subir ni la torture ni des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Ces deux droits sont protégés par la Déclaration universelle des droits de l’homme, adoptée par l’ONU en 1948.

La lutte contre la peine de mort est le combat principal d’Amnesty International depuis 1975. Les rapports de cette organisation mettent en lumière deux mouvements contradictoires :

  • la diffusion et la consécration des idées abolitionnistes dans le monde ;
  • l’explosion du nombre d’exécutions dans les pays ne condamnant pas la peine de mort.

Au fil du temps, la communauté internationale a adopté plusieurs instruments qui interdisent le recours à la peine de mort, notamment les suivants :

  • Le Deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, visant à abolir la peine de mort.
  • Le Protocole n° 6 à la Convention de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales concernant l’abolition de la peine de mort, et le Protocole n° 13 à la Convention de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales, relatif à la peine de mort en toutes circonstances.
  • Le Protocole à la Convention américaine relative aux droits de l’homme, traitant de l’abolition de la peine de mort.

Même si le droit international prévoit que le recours à la peine de mort doit être réservé aux crimes les plus graves, c’est-à-dire l’homicide volontaire, Amnesty International pense que ce châtiment n’est jamais la solution. Si la peine de mort est implicitement condamnée dans la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948, qui consacre le droit à la vie, l’ONU prend clairement position contre la peine capitale dans le deuxième protocole du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. L’article premier énonce ainsi :

  1. Aucune personne relevant de la juridiction d’un État partie au présent protocole ne sera exécutée
  2. Chaque État partie prendra toutes les mesures voulues pour abolir la peine de mort dans le ressort de sa juridiction.

Quelles sont les méthodes d’exécution liées à la peine de mort couramment utilisées dans le monde ?

  • Décapitation
  • Pendaison
  • Injection létale
  • Exécution par balle
  • Bûcher
  • upplice de la roue
  • Écartèlement
  • Bouillage.

Quel est le pourcentage d’haïtiens exigeant le recours à la peine de mort contre les puissants bandits matériels et intellectuels ?

À travers un sondage réalisé à la fin du mois de mai 2022 sur 337 participants vivant en Haïti, les résultats montrent que 82 % des haïtiens exigent le recours à la peine de mort contre les puissants bandits matériels et intellectuels. La figure 1 présente la perception de la population haïtienne au sujet de la peine de mort contre tout puissant bandit.

 

Comme dans la littérature, les 82 % des haïtiens qui exigent le recours à la peine de mort contre les puissants bandits matériels et intellectuels estiment que le recours à la peine de mort est justifié par :

  • une idée de justice, de réparation pour les victimes ;
  • la nécessaire protection de la société contre un individu dangereux que l’on met hors d’état de nuire ;
  • son effet dissuasif ;
  • un argument économique : la mise à mort coûte moins cher à la société que la prison à vie.

Pour les 11 % des haïtiens qui refusent le recours à la peine de mort contre les puissants bandits matériels et intellectuels, ils mentionnent l’importance du droit à la vie. Selon les partisans de cette approche, « Tu ne tueras point » est une règle universelle, et tuer est une violation des droits fondamentaux de l’être humain, tels qu’il sont notamment exposés dans la Déclaration universelle des droits de l’homme. Ils sont contre la peine de mort parce que :

  • la peine de mort a un caractère irrévocable qui empêche de faire machine arrière en cas d’erreur judiciaire ;
  • elle interdit toute réhabilitation, toute idée de pardon et de deuxième chance ;
  • elle ne serait pas plus dissuasive que la prison à vie ;
  • son utilisation « légalisée » pourrait inciter à des exécutions sommaires non contrôlées, en dehors de tout procès.

Pourquoi les États-Unis d’Amérique et le Japon n’abolissent pas la peine de mort dans tous leurs États ?

En termes de peine de mort, les chiffres du dernier rapport d’Amnesty International (Ooreka, 2022) montrent qu’il a :

  • 101 pays abolitionnistes pour tous les crimes ;
  • 6 pays abolitionnistes pour les crimes de droit commun seulement ;
  • 34 pays abolitionnistes en pratique ;
  • 58 pays non abolitionnistes (dont le Japon et les États-Unis, où 34 États prévoient la peine de mort).

Parmi les pays non abolitionnistes, la première grande puissance économique, États-Unis d’Amérique, et la troisième grande puissance économique, Japon (Hadouni, 2022) font partie intégrante de cette liste. Pourquoi les États-Unis d’Amérique et le Japon n’abolissent pas la peine de mort dans tous leurs États ?

Aux États-Unis d’Amérique, la peine de mort est appliquée au niveau fédéral, par la justice militaire ainsi que dans vingt-six des cinquante États fédérés que compte le pays. Aujourd’hui, les États-Unis font partie du cercle restreint des démocraties libérales qui appliquent la peine de mort. En 2021, vingt-quatre États américains (sur cinquante) ne pratiquent plus la peine de mort. Ainsi, trois types de juridictions peuvent prononcer la peine de mort :

  • les cours de certains États fédérés où il existe une loi prévoyant la peine de mort validée par les juridictions ;
  • les cours fédérales, pour certains crimes fédéraux (relativement rares) ;
  • les cours militaires (loi martiale), pour le cas de militaires commettant des crimes graves tels que le meurtre (rarissime).

Le Model Penal Code de 1962 élaboré dans un objectif d’harmonisation des législations suggère l’application des circonstances aggravantes suivantes

  • L’accusé était incarcéré au moment des faits ;
  • L’accusé avait déjà été condamné pour meurtre ou crime incluant l’utilisation de la violence ;
  • L’accusé a commis plusieurs meurtres ;
  • L’accusé a sciemment créé un grave risque de mort pour plusieurs personnes ;
  • Le meurtre a été commis en concomitance avec un viol, un vol, un enlèvement ou un incendie volontaire ;
  • Le meurtre a été commis pour éviter une arrestation ou permettre une évasion ;
  • Le meurtre a été commis à des fins pécuniaires ;
  • Le meurtre a été commis d’une manière particulièrement haineuse, atroce ou cruelle, manifestant une dépravation exceptionnelle.

Des lois pénales de certains États prévoient la peine de mort pour les crimes suivants, sans l’utiliser :

  • Parjure ayant entraîné l’exécution d’un innocent (Californie et Idaho) ;
  • Viol d’enfant (Texas, Oklahoma, Caroline du Sud, Floride, Louisiane, Géorgie), lois déclarées anticonstitutionnelles (Kennedy v. Louisiana) ;
  • Viol d’adulte en récidive (Montana) ;
  • Trafic de drogue en grande quantité ou suivi de mort d’un consommateur notamment (Floride, Missouri et gouvernement fédéral) ;
  • Trahison (Arkansas, Californie, Colorado, Géorgie, Illinois, Louisiane, Mississippi, Missouri, Vermont, Washington) ;
  • Détournement d’avion (Géorgie et Missouri) ;
  • Enlèvement aggravé (Colorado, Idaho, Missouri) ;
  • Conspiration par une organisation criminelle dans le but de faire assassiner un juré, un témoin ou un officier (gouvernement fédéral).

Au Japon, la peine de mort constitue le châtiment suprême dans ce pays, qui l’exécute exclusivement par pendaison, anciennement également par décapitation. La peine capitale est dans la pratique utilisée principalement contre les auteurs de plusieurs meurtres, commis avec circonstances aggravantes. En 1983 dans l’affaire Norio Nagayama la Cour suprême du Japon estime que la peine de mort ne peut s’appliquer que « lorsque la responsabilité de l’auteur du crime est extrêmement grave et que la peine maximale est inévitable du point de vue de l’équilibre entre le crime et le châtiment ainsi que du point de vue général de la prévention ». Elle définit, dans cette décision, les fameux « critères de Nagayama » selon lesquels les juges doivent prendre leur décision ; soit :

  • la nature du crime ;
  • le motif du crime ;
  • les modalités du crime, en particulier la persistance et la cruauté du moyen de mise à mort ;
  • la gravité des conséquences du crime, en particulier le nombre de victimes tuées ;
  • les sentiments des proches en deuil ;
  • les effets sociaux du crime ;
  • l’âge du criminel ;
  • les antécédents de l’auteur du crime ;
  • les circonstances qui suivent l’accomplissement du crime.

Haiti et la peine de mort

Haiti est un pays abolitionniste de la peine de mort depuis 1987. En termes d’engagements internationaux, Haïti n’a pas ratifié de traité international abolissant la peine de mort. Toutefois, pour cette région dont fait partie Haïti, 2 traités régionaux et internationaux interdisent la peine de mort. La peine de mort a été totalement abolie lors de l’adoption par référendum de la Constitution de 1987. Déjà en 1985, un décret gouvernemental l’avait supprimée pour la plupart des délits politiques, à l’exception de la haute trahison. Elle demeurait cependant pour des crimes de droit commun, comme certains cas de meurtre (Peine de mort, S.d).

Il est à mentionner que dans le cadre de la nouvelle de la constitution souhaitée par l’ancien président défunt d’Haïti, Jovenel Moïse, certaines sources indiquaient que le rétablissement de la peine de mort en Haïti était à l’étude. Selon l’ex-Président intérimaire Boniface Alexandre qui dirigeait le Comité consultatif indépendant (CCI) chargé de rédiger la nouvelle constitution, le rétablissement de la peine capitale a été envisagé, même si rien n’avait encore été décidé. Il faut savoir que la peine de mort a été abolie en Haïti en 1987 lors de l’adoption de la Constitution par référendum. Avant cela, la peine de mort était appliquée principalement pour haute trahison à la nation, ainsi que pour de graves crimes de droit commun comme le meurtre.

CONCLUSION

Comme dans certains États des États-Unis d’Amérique, la peine de mort est un bon outil pour restaurer la crainte lorsqu’elle est controlée en toute justice et en faveur des idéaux nationaux. Néanmoins, elle est une menace pour l’État de droit lorsqu’elle est entre les mains d’anarchistes.

RÉFÉRENCES

Amnesty international. (S.d.). Nous sommes convaincus qu’ensemble, nous pouvons faire disparaître la peine de mort partout. Tiré le 5 juin 2022 de https://www.amnesty.org/fr/what-we-do/death-penalty/

Hadouni, F. (2022). PIB : Le classement 2022 des pays les plus riches du monde. Tiré le 5 juin 2022 de https://business-cool.com/decryptage/classements/pib-classement-pays-riches-monde-2022/

Ooreka. (2022). Peine de mort. Tiré le 5 juin 2022 de https://justice.ooreka.fr/astuce/voir/527297/peine-de-morthttps://justice.ooreka.fr/astuce/voir/527297/peine-de-mort

Peine de mort. (S.d.). Peine de mort : Haiti. Tiré le 5 juin 2022 de https://www.peinedemort.org/zonegeo/HTI/Haiti

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Le Centre de Recherche Intégrée et Scientifique d’Haïti (CRISH) aussi connu sous le nom de Le Scientifique est créé à Milot (Haïti), le 10 novembre 2017, dans le but de servir la communauté scientifique et les désireux en quête de savoir et d’information scientifique pour comprendre et interpréter les phénomènes écosystémiques. Particulièrement, il promeut la culture scientifique en Haïti et dans les Caraïbes à des fins de développement durable et de la paix. Le Centre de Recherche Intégrée et Scientifique d’Haïti (CRISH) est apolitique, à but non lucratif et en libre accès (Open Access). La vision du Centre de Recherche Intégrée et Scientifique d’Haïti (CRISH) est « devenir une revue scientifique intégrée de référence dans le monde afin de parer au manque de revues scientifiques en Haïti et dans les Caraïbes ». La raison d’être du Centre de Recherche Intégrée et Scientifique d’Haïti (CRISH) est de promouvoir « la culture scientifique au service du développement durable et de la paix » tout en travaillant en collaboration avec les institutions et particuliers en vue de promouvoir la recherche et la science en Haïti et dans les Caraïbes. Email : info@lescientifique.org WhatsApp : +(509) 46307623
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